Par le Pr Arsène Mekinian (Maj Mai 2023)
Le spectre des manifestations rénales au cours de la sclérodermie systémique est divers, allant d’une diminution isolée du débit de filtration glomérulaire, d’une protéinurie isolée à la crise rénale sclérodermique. La crise rénale sclérodermique est la complication rénale la plus redoutée bien que sa mortalité a considérablement diminué depuis l’émergence des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine. La crise rénale sclérodermique était la principale cause de décès chez les patients atteints de SSc, jusqu’à l’introduction des inhibiteurs de l’ECA dans les années 1990.
La crise rénale sclérodermique est définie comme l’élévation aiguë de la créatinine sérique, qui peut ou non être accompagnée d’une hypertension modérée à sévère d’apparition récente. En effet, contrairement aux idées reçues, la crise rénale sclérodermique peut exister sous une forme normotensive chez 10% des patients. Des lésions de microangiopathie thrombotique peuvent être observées jusqu’à 50% des cas.
La crise rénale sclérodermique est plus fréquente dans les formes diffuses à progression rapide, avec une incidence élevée en particulier au cours des 5 premières années. Dans l’ensemble, la prévalence de la crise rénale sclérodermique a été estimée à environ 5-10% des patients atteints de sclérodermie systémique, bien que des données récentes suggèrent une estimation plus proche de 2,4%. Une crise rénale sclérodermique est plus fréquente en cas d’anticorps anti-ARN polymérase III et peut être favorisée par l’utilisation de fortes dose de corticoïdes.
La prise en charge thérapeutique repose sur un contrôle précoce de la pression artérielle sous IEC, éventuellement en association à d’autres classes thérapeutiques. En cas d’insuffisance rénale sévères, l’épuration extrarénale permet de contrôler rapidement la surcharge vasculaire et la pression artérielle.