La forme cutanée diffuse de la sclérodermie systémique : L’Etude ESOS

Titre article original : Treatment outcome in early diffuse cutaneous systemic sclerosis: the European Scleroderma Observational Study (ESOS)

Nom auteurs : Ariane L Herrick, Xiaoyan Pan, Sébastien Peytrignet, Mark Lunt,
Roger Hesselstrand, Luc Mouthon, et al

  • rédacteur de la veille bibliographique: Pr. Brigitte Granel
  • Lien associé pubmed
  • Références : Ann Rheum Dis 2016;0:1–12. doi:10.1136/annrheumdis-2016-210503

Résumé : La forme cutanée diffuse de la sclérodermie systémique (ScS) représente approximativement 25% des cas. Elle est associée à une forte morbidité et mortalité en lien avec l’atteinte viscérale et le développement rapidement progressif de l’atteinte cutanée. L’approche thérapeutique proposée par l’European League Against Rheumatism (EULAR), qui est de traiter par du méthotrexate l’atteinte cutanée, n’a qu’une efficacité limitée. D’où l’intérêt de cette étude, qui se base sur une approche observationnelle pour évaluer différents traitements immunosuppresseurs, y compris un groupe de patients « sans traitement immunosuppresseur » ciblant la forme précoce de ScS cutanée diffuse.


Méthodes : L’étude ESOS (European Scleroderma Observational Study) est une étude prospective, observationnelle de cohorte, dans laquelle des données standardisées sont collectées à l’entrée et durant le suivi des patients de façon électronique. Les critères d’inclusion sont :
-forme précoce (moins de 3 ans) de ScS dans sa forme cutanée diffuse
– âge >18 ans
Les critères d’exclusion sont:
– transplantation d’organe, immunosuppresseurs prescrits de plus de 4 mois
– tout immunosuppresseur autre que le méthotrexate, mycophénolate mofétil (MMF) ou cyclophosphamide dans le mois avant l’entrée dans l’étude
Les cliniciens et les patients choisissaient 4 stratégies thérapeutiques:
1. Methotrexate (oral sous sous cutané)
2. MMF
3. Cyclophosphamide (intraveineux ou oral). Les patients traités par du cyclophosphamide reçoivent ensuite un immunosuppresseur de maintenance (méthotrexate, MMF ou azathioprine) selon le choix du clinicien.
4. Pas d’immunosuppresseur
Les patients sont évalués à l’entrée puis tous les 3 mois pour 24 mois. Les patients sont recrutés entre juillet 2010 et septembre 2014.
L’objectif primaire est le changement du score cutané de Rodnan (mRSS) dans le temps.
Les objectifs secondaires sont : la Capacité Vitale Forcée (CVF), la diffusion de monoxyde de carbone (DLCO), la qualité de vie avec le Health Assessment Questionnaire Disability Index (HAQ-DI), le score de la main de Cochin, la survenue d’effets indésirables et la survie.

Résultats:
– 326 patients de 50 centres (19 pays) sont recrutés.
– Le nombre de patients entrant dans les différents protocoles est le suivant: 65 (19,9%) méthotrexate, 118 (36,2%) MMF, 87 (26,7%) cyclophosphamide et 56 (17,2%) pas de traitement immunosuppresseur.
-La médiane du mRSS (21, IQR 16–27) ne diffère pas entre les 4 groupes (p=0,306)
-Les patients du groupe cyclophosphamide ont davantage de fibrose pulmonaire (p=0,036) ou d’atteinte cardiaque (p=0,009).
– Les patients du groupe « pas d’immunosuppresseur » ont davantage d’atteinte rénale (p=0,039), et ceux du groupe « méthotrexate » ont davantage d’atteinte musculaire (p=0,002).
– Concernant le suivi des patients: 276 patients (84,7%) sont évalués à 12 mois et 234 (71,7%) ont complété les 24 mois.
– Le changement du score de mRSS après 12 et 24 mois est de −2,9 et −6,7 points. Une réduction statistiquement significative est observée dans les 4 groupes de traitement: à 12 mois (−4,0 pour le méthotrexate, −4,1 pour le MMF, −3,3 pour le cyclophosphamide et −2,2 pour le groupe non traité). La différence entre les groupes n’est pas significative (p=0,346).
– Le changement de la CVF et du DLCO entre les groupes n’est pas significative (p=0,460 et 0,505).
– Le changement du HAQ-DI et du CHFS ne diffère pas entre les groupes (p=0,130 et 0,073).
– La survie est moindre dans le groupe non traité à 12 et 24 mois mais la différence entre les groupes n’est pas significative.
– Des effets indésirables sont notés chez 29 (38,7%), 40 (22%) et 23 (22,8%) dans les groupes méthotrexate, MMF et cyclophosphamide, respectivement.
Conclusion : Malgré les limites d’une étude non randomisée et purement observationnelle, ce travail réalisé dans la « vraie vie »ne montre pas de différence entre les 4 stratégies thérapeutiques ciblant la forme débutante de ScS cutanée diffuse. Il est quand même à noter pour le clinicien que le groupe « sans traitement » est celui dans lequel l’amélioration du mRSS et la survie sont moindres. Un traitement immunosuppresseur est donc probablement à prescrire dans cette forme de ScS, sans grande évidence pour une préférence dans cette étude.

Mots clé (max 5):Mots clé: Sclérodermie systémique, méthotrexate, MMF, cyclophosphamide, forme cutanée diffuse

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