La cartographie paramétrique par résonance magnétique cardiaque peut détecter une atteinte cardiaque précoce chez les patients atteints de sclérodermie systémique

Résumé par Magali LE BRUN (interne DES de médecine interne-immunologie clinique)  &  Brigitte GRANEL

 Cardiac magnetic resonance parametric mapping can detect early cardiac involvement of patients with systemic sclerosis: M. Purevsuren, M. Uehara, M. Ishizuka, T. Hara, N. Kakuda, T. Tsuji, T. et alEuropean Heart Journal, Volume 42, Issue Supplement_1, October 2021, ehab724.0223, https://doi.org/10.1093/eurheartj/ehab724.0223

Introduction : La sclérodermie systémique (ScS) est une pathologie auto-immune avec deux formes cutanées : limitée et diffuse. Cette dernière est généralement associée à des atteintes fibrosantes d’organes plus sévères que la forme limitée et son pronostic est moins bon. La place de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque avec cartographie paramétrique dans la détection de l’atteinte myocardique précoce chez les patients atteints de ScS n’est pas encore codifiée.

Objectif : Déceler l’atteinte myocardique en IRM cardiaque et évaluer les différences entre les deux formes cutanées.

Méthodes : L’étude a inclus de manière consécutive 57 patients atteints de SSc : 27 formes cutanées diffuses (dScS) et 30 limitée (lScS) qui avaient consulté à l’Hôpital universitaire de médecine de Tokyo entre Juillet 2018 et Février 2021, et qui avaient passé une IRM cardiaque 3T. L’atteinte myocardique a été analysée grâce à l’IRM cardiaque  avec cartographie paramétrique, et comparée aux données cliniques.

Résultats : La  durée moyenne d’évolution de la maladie étaient proches, 4,0±6,5 et 4,4±8,3 ans respectivement chez les patients dScS et lScS. Chez l’ensemble de ces patients l’évaluation de la fraction d’éjection du ventricule gauche (FEVG) était similaire: 58,8 % chez les patients avec dScS vs 59,6 % chez ceux avec lScS. En revanche les volumes atriaux gauche et droit étaient significativement supérieurs chez les patients avec dScS comparés à ceux avec lScS.

Les valeurs en pondération T1 au sein du septum inter-ventriculaire (SIV) avant et après injection de Gadolinium étaient supérieures chez les patients avec dScS vs lScS : il n’y avait en revanche pas de différence en cartographie du volume extra-cellulaire ni en T2. Ainsi, les valeurs en T1 pré-Gadolinium dans le SIV étaient corrélées positivement avec le ratio E/e’  en échocardiographie-Doppler (*) et avec les taux plasmatiques de BNP, chez les patients avec dScS et l’ensemble des patients avec ScS, mais pas chez ceux avec lScS.

L’analyse de régression logistique multivariée permettait de conclure que la valeur en T1 natif dans le SIV est un facteur prédictif indépendant du rapport E/e’ dans les populations ScS et dScS.

Lors de la construction de la courbe ROC, pour un rapport E/e’ ≥ 14, la valeur seuil en T1 natif est ≥ 1348 ms (AUC 0,762 sensibilité de 80 % et spécificité de 68%). Par ailleurs, les taux de BNP étaient significativement plus hauts chez ces patients en comparaison de ceux avec un T1 natif < 1348 ms.

Conclusion : Les patients avec une dScS avaient des valeurs de T1 non injecté au niveau du SIV plus élevées, et des volumes atriaux gauche et droit plus importants que les patients avec une lScS. Cela suggère que ces patients avaient une atteinte myocardique et une dysfonction diastolique du VG plus sévères, hypothèse qui est soutenue par un rapport E/e’ et des taux de BNP plus élevés chez eux, par rapport aux patients avec lScS. La détection précoce de valeurs élevées en T1 spontané sur le SIV chez les patients atteints de ScS pourrait ainsi prédire la survenue d’événements cardio-vasculaires futurs.

(* ) Le rapport E/e’ est un équivalent du rapport E/A permettant l’évaluation de la fonction diastolique ventriculaire gauche. L’onde E correspond au remplissage précoce passif du VG dépendant du gradient de pression (70% du remplissage total), l’onde A représente le remplissage tardif par la systole atriale. L’onde e’ correspond à la vitesse de déplacement de l’anneau mitral vers le VG en proto-diastole, et dépend uniquement de la capacité de relaxation du VG. Un rapport E/e’ augmenté suppose donc une capacité de relaxation du VG altérée avec dysfonction diastolique.

Magali LE BRUN  & Brigitte GRANEL