Efficacité et sécurité à long terme du Tocilizumab dans la pneumopathie interstitielle diffuse précoce de la Sclérodermie Systémique

Khanna D et al, American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine 2022 PMID: 34851799 DOI: 10.1164/rccm.202103-0714OC

Analyse par Magali Lebrun sous la direction de Brigitte Granel

Contexte
La sclérodermie systémique (ScS) est une maladie auto-immune rare caractérisée par une fibrose diffuse et des anomalies vasculaires affectant notamment la peau et des poumons. Le taux moyen de mortalité à 10 ans est de 34%, soit le plus élevé parmi les pathologies rhumatologiques, en lien avec la pneumopathie interstitielle diffuse (PID).

Des taux élevés d’Interleukine 6 (IL-6), une cytokine pro-inflammatoire, sont retrouvés chez les patients avec une forme cutanée diffuse ou une PID de la ScS, et sont associés au déclin de la Capacité Vitale Forcée (CVF). Ainsi l’IL-6 serait un facteur clé de la progression de la maladie au stade précoce.
Le Tocilizumab est un anticorps monoclonal anti récepteur de l’IL-6 : dans l’essai de phase 2 faSScinate (tocilizumab SC pendant 24 semaines), l’efficacité sur l’amélioration de la fibrose cutanée n’a pas été atteinte mais le groupe tocilizumab bénéficiait d’un ralentissement du déclin de la CVF. Dans l’essai de phase 3 focuSSced, le Tocilizumab n’a pas non plus montré d’amélioration significative du score cutané à 48 semaines (S48), mais une amélioration de la CVF et de la fibrose pulmonaire sur la TDM. Les auteurs rapportent l’efficacité et la sécurité à long terme (S96)  du Tocilizumab suite à la période supplémentaire de 48 semaines en ouvert de l’essai focuSSced.

Objectif
Les auteurs ont analysé l’efficacité et la sécurité du Tocilizumab à S96 selon le score cutané de fibrose, la variation de CVF et de DLCO, l’évaluation globale de la qualité de vie ainsi que le nombre d’événements indésirables (EI) et d’EI graves pour 100 patients année.

Matériel et méthodes
Il s’agit d’une étude multicentrique, randomisée, contrôlée, en double aveugle (jusque S48) puis en ouvert (jusque S96) portant sur des patients adultes en Europe, en Amérique et au Japon.
Les patients inclus répondaient aux critères de l’ACR-EULAR 2013 et avaient une atteinte cutanée diffuse, un début de la ScS de moins de 5 ans et un syndrome inflammatoire biologique ; entre 61 et 65 % avaient une PID préexistante.
L’étude évaluait l’efficacité et la sécurité à S96 du Tocilizumab par rapport à un placebo, sur la progression des atteintes cutanée (critère principal) et pulmonaire (critère secondaire).

Résultats 
Parmi les 212 patient inclus dans la phase en double aveugle, 107 ont reçu le placebo et 105 le Tocilizumab. Lors de la phase en ouvert, respectivement 89 et 92 patients de chaque groupe (Placebo puis Tocilizumab = PT, et Tocilizumab continu = TC) ont reçu du Tocilizumab pendant 48 semaines supplémentaires. L’âge moyen et la durée de la maladie étaient de 48 ans et 23 mois.
Les patients des 2 groupes présentaient une amélioration comparable du score cutané lors de la phase en ouvert.
En revanche, il existait une moindre aggravation de la CVF à S96 chez les patients du groupe TC, notamment ceux avec PID préexistante, par rapport au groupe PT (dans la continuité des résultats à S48). Par ailleurs, le déclin de la CVF observé à S48 chez les patients du groupe PT était freiné à S96 après la prise de Tocilizumab.
On ne notait pas de différence de qualité de vie à S96 entre les 2 groupes.
Les taux d’EI et EI graves durant la période en ouvert étaient similaires entre les 2 groupes, stables par rapport à la période en aveugle (taux pour 100 années-patients d’EI graves de S48 à S96 de 14,8 pour PT et de 15,8 pour TC).

Le principal EI relié au Tocilizumab était les infections. Six décès survenaient pendant l’essai dont 2 pendant la période en ouvert, reliés au traitement.

Conclusion
Chez les patients atteints de SSc précoce et de forme cutanée diffuse, le Tocilizumab n’a pas permis d’améliorer l’atteinte cutanée. En revanche, il a permis de préserver la fonction respiratoire à S48 et S96, y compris chez les patients atteints de PID quelle qu’en soit la sévérité. Il existe également une stabilisation du déclin de la CVF sous Tocilizumab à S96 chez les patients ayant initialement présenté une aggravation à S48 sous placebo.
Cette étude montre donc une potentielle efficacité du Tocilizumab sur l’atteinte pulmonaire de la ScS; il est autorisé dans cette indication aux USA, alors qu’en France, il ne peut être envisagé qu’après validation en RCP (utilisation hors AMM).

Taux d’incidence standardisé et facteurs de risque de cancer chez les patients atteints de sclérodermie systémique: données du registre espagnol de sclérodermie (RESCLE)

Résumé par Magali LE BRUN
Supervisé par le Pr Brigitte GRANEL

d’après” Standardized incidence ratios and risk factors for cancer in patients with systemic sclerosis: Data from the Spanish Scleroderma Registry (Registro Español de SCLErodermia, RESCLE)”

Contexte
La sclérodermie systémique (ScS) est une maladie auto-immune conduisant à des lésions vasculaires et une fibrose excessive cutanée et pulmonaire. Les principales causes de mortalité sont l’hypertension pulmonaire (HTP) et la pneumopathie interstitielle diffuse (PID). Toutefois, les progrès réalisés ces dernières décennies dans le dépistage et la prise en charge de ces manifestations ont permis la diminution de la mortalité associée à la ScS, avec comme corollaire une augmentation de la mortalité non liée à la ScS. Il semble exister une augmentation de la prévalence des néoplasies chez ces patients. Plusieurs facteurs de risque de néoplasie ont été identifiés dans la ScS, notamment la présence d’anticorps anti-ARN polymérase III, mais des études épidémiologiques plus précises sont nécessaires afin de pouvoir envisager le développement de programmes de prévention.

Objectif
Les auteurs ont analysé le taux d’incidence standardisé (TIS) de cancer chez les patients avec ScS dans la population espagnole, puis ont cherché à identifier les facteurs de risque de cancer chez ces patients.

Matériel et méthodes

L’étude portait sur les patients du registre observationnel multicentrique (40 hôpitaux) national de la ScS en Espagne (RESCLE). Les patients inclus répondaient aux critères de l’ACR-EULAR 2013 et/ ou aux critères modifiés de LeRoy et Medsger (1988), incluant les patients ne présentant pas d’atteinte cutanée de la ScS. Les données étaient collectées de façon rétrospective jusqu’en 2006, puis de façon prospective jusqu’en 2018. L’étude évaluait l’incidence des cancers et les facteurs de risque imputables dans leur survenue.

Résultats
Parmi les 1930 patients de la cohorte, 206 (soit 10,7%) présentaient un cancer au cours du suivi et 34 (18,9%) des tumeurs ont été considérées comme associées à la ScS. Le risque de cancer était plus élevé chez les patients avec ScS que dans la population générale (TIS 1,48; IC95 [1,36-1,6O]), avec notamment un sur-risque de cancer du sein, du poumon, et hématologique. Les facteurs de risque associés au cancer chez les patients avec ScS étaient l’âge de début plus élevé au diagnostic, la présence d’une PID avec capacité vitale forcée < 70%, et la présence d’une cholangite biliaire primitive (CBP). La présence d’anticorps anti-centromères (ACA) semblait protectrice contre le risque de cancer. Du fait du faible nombre de positivité, l’association avec la présence d’anti-ARN polymérase III n’était pas retrouvée. Les taux de mortalité étaient plus importants chez les patients ScS avec cancer que chez ceux sans cancer, principalement en lien avec des manifestations non liées à la ScS et en premier lieu le cancer (suivi par le sepsis). A l’opposé, les principales causes de mortalité chez les patients ScS sans cancer étaient la PID et l’HTP liées à la ScS.

Conclusion
Le risque de cancer est plus élevé chez les patients avec ScS que dans la population générale, avec notamment une fréquence des cancers du sein, du poumon et hématologiques. Les facteurs de risque identifiés comportent une atteinte interstitielle pulmonaire modérée à sévère et la présence d’une CBP, tandis que les ACA auraient un rôle protecteur. Cette étude montre l’importance de suivre de façon étroite les patients avec ScS notamment ceux avec une PID ou une CBP, étant donné le risque de cancer plus élevé dans cette population.

Rôle des microARNs dans la pathogénie de la fibrose et de la vasculopathie de la Sclérodermie systémique

Littérature commentée par Brigitte GRANEL

Henry TW, Mendoza FA, Jimenez SA. Role of microRNA in the pathogenesis of systemic sclerosis tissue fibrosis and vasculopathy. Autoimmunity reviews 2019; 18 (11): 102396. Review. https://doi.org/10.1016/j.autrev.2019.102396

La sclérodermie systémique (ScS) se caractérise par une atteinte vasculaire fibrosante et par l’accumulation exagérée de tissu fibreux dans la peau et dans de nombreux viscères. Cette revue de la littérature présente les données accumulées de la science sur le rôle des microARNs dans le développent et la régulation des anomalies vasculaires et de la fibrose de la ScS.

Les microRNAs sont des petits fragments d’ARN non codants (environ 22 nucléotides), conservés tout au long de l’évolution, qui jouent un rôle important dans la régulation de l’expression des gènes codant pour des protéines, au niveau post-transcriptionnel. Leurs mécanismes d’action sont complexes et requièrent une liaison à une séquence spécifique de la région non traduite 3’ ou 5’ de l’ARN cible, entrainant soit une inhibition de la traduction de l’ARN soit une dégradation accélérée de cet ARN. Ceci leur confère des fonctions régulatrices de l’expression de gènes, potentiellement impliquées dans de nombreux processus physiologiques impliquant la croissance, la différenciation, l’immunité et le métabolisme. Il a été démontré que les microARNs ne sont pas uniquement confinés au secteur intracellulaire, mais qu’ils peuvent être sécrétés et transportés dans les exosomes et autres microvésicules pour exercer un effet paracrine sur des cibles aux alentour et plus distantes.

Les principales conclusions sur les différentes fonctions des microARNs dans les processus physiopathologiques de la ScS sont les suivantes :

  • Les microARNs sont impliqués dans la régulation de la libération du Nitric Oxide (NO) endothélial, un puissant vasodilatateur. Ainsi, les microARNs sont impliqués dans de défaut de production du NO observé chez les patients ayant une ScS.
  • Les microARNs ont une connexion avec le processus profibrotique passant par la voie canonique de signalisation de Wnt/β-caténine qui intervient dans l’activation du fibroblaste et dans l’homéostasie endothéliale. Par exemple, une élévation des taux de miR-34a été observée dans les échantillons issus de patients avec ScS. Les taux de miR-34a corrélaient avec les manifestations vasculaires telles que les ulcères digitaux.
  • Les microARNs ont des effets sur la voie de l’urokinase-type plasminogen activator (uPA) et son récepteur (uPAR). De façon physiologique, une modification de la voie uPA-uPAR peut altérer l’angiogénèse et le processus de réparation vasculaire. Il a été montré que miR-193b était régulé négativement dans les biopsies de peau et dans les fibroblastes du derme des patients avec SSc. La baisse des taux de miR-193b entrainait une augmentation de la régulation de l’uPA et de la prolifération des cellules musculaires lisses.
  • Les microARNs interviennent dans la régulation de la production de l’endothéline-1. L’endothéline-1 est un puissant peptide vasoconstricteur. L’endothéline-1 est aussi impliquée dans la prolifération vasculaire et la fibrose de la ScS. L’endothéline-1 est élevée dans le sérum des patients avec ScS. Une élévation de l’endothéline-1 est associée à la pathogénie de la ScS et surtout à la fréquence de l’hypertension artérielle pulmonaire. Des microARNs ont été associés à la modulation de l’endothéline-1. Par exemple, miR-98 est un inhibiteur de l’endothéline-1. Cette dernière peut aussi induire l’expression de certains microARNs impliqués dans la prolifération des cellules musculaires lisses vasculaires.
  • Les microARNs interviennent dans la transition endothéliale vers un phénotype mésenchymenteux : un processus clé récemment considéré dans la pathogénèse de la ScS est la transition des cellules endothéliales en cellules mésenchymateuses (EndoMT). Il a été observé que miR-21 est un promoteur de l’EndoMT au cours de la ScS. D’autres microARNs ont été identifiés comme des stimulateurs et des inhibiteurs de l’EndoMT.
  • Les microARNs sont associés à la fibrose de la ScS. Certains ont un effet profibrosant, d’autres un effet anti-fibrosant et ils peuvent moduler l’expression des gènes profibrotiques de la voie du TGF-β. Par exemple, la famille des miRNA-29 a une importante implication dans la pathogénèse de la ScS, car ces microARNs régulent l’expression de gènes de collagène et de facteurs de transcription impliqués dans les voies de fibrose. Il a été démontré que les miR-29 ont un effet anti-fibrosant et qu’ils sont abaissés dans les fibroblastes dermiques de la ScS. Ainsi, l’augmentation de l’expression de miR-29 dans les fibroblastes de ScS diminue la production des collagène de type I et type III, suggérant un effet post-transcriptionnel de miR-29. Les effets anti-fibrosants de miR-29 ont été observés dans les poumons, les reins, et la fibrose myocardique.
  • Les microARNs peuvent être une connexion entre l’atteinte vasculaire et la fibrose de la ScS. En effet, de nombreux microARNs ont été étudiés individuellement soit dans la vasculopathie, soit dans la fibrose de la ScS, alors que leurs effets pourraient intervenir dans ces deux processus, dans des cascades en boucle d’activation/régulation de la vasculopathie et de l’inflammation/fibrose, comme très bien illustré dans cet article.

Au total, les microARNs interviennent dans la pathologie de la ScS et permettent de mieux connecter l’atteinte vasculaire avec la fibrose, ouvrant de nouvelles approches thérapeutiques ciblées.

Regional grafting of autologous adipose tissue is effective in inducing prompt healing of indolent digital ulcers in patients with systemic sclerosis: results of a monocentric randomized controlled study

Del Papa N, Di Luca G, Andracco R, Zaccara E, Maglione W, Pignataro F, Minniti A, Vitali C. Arthritis Res Ther. 2019 Jan 7;21(1):7. doi: 10.1186/s13075-018-1792-8

Background : Cette équipe Italienne a déjà publié 15 cas d’efficacité du traitement de l’ulcère digital (UD) ischémique par du tissu adipeux (TA) autologue chez les patients souffrant de Sclérodermie systémique (ScS). Elle propose ici un essai contrôlé randomisé pour confirmer leurs données préliminaires.

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Devenir des patients ayant une Sclérodermie systémique traités par rituximab dans la pratique courante : une étude de cohorte prospective

Elhai M, Boubaya M, Distler O, Smith V, Matucci-Cerinic M, Alegre Sancho JJ, et al; for EUSTAR network d’après Outcomes of patients with systemic sclerosis treated with rituximab in contemporary practice: a prospective cohort study.

Liens: Ann Rheum Dis. 2019 Jul;78(7):979-987. doi: 10.1136/annrheumdis-2018-214816.

Lien associé pubmed: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30967395

Résumé par le Pr Brigitte GRANEL

Background : Cette étude évalue la sécurité et l’efficacité du rituximab dans la Sclérodermie Systémique (ScS) en pratique clinique.

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Efficacité et tolérance de l’abatacept dans les formes débutantes de sclérodermie systémique avec atteinte cutanée diffuse

Valentini G, Huscher D, Riccardi A, Fasano S, Irace R, Messiniti V, et al.
Khanna D, Spino C, Johnson S, Chung L, Whitfield M, Denton CP, et al. Abatacept in Early Diffuse Cutaneous Systemic Sclerosis – Results of a Phase 2 Investigator‐Initiated, Multicenter, Double‐Blind Randomized Placebo‐Controlled Trial.

Liens: Arthritis Rheumatol [Internet]. 24 juill 2019 [cité 23 sept 2019]; Disponible sur: https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/art.41055 (PubMed)

Résumé par le Docteur Alain LESCOAT (CHU Rennes)

Introduction : L’Abatacept a démontré son efficacité sur l’atteinte cutanée et pulmonaire dans des modèles murins de sclérodermie systémique. Cette étude de phase 2 visait à évaluer l’efficacité et la tolérance de ce traitement sur la fibrose cutanée au cours de la sclérodermie systémique avec atteinte cutanée diffuse évoluant depuis moins de 3 ans.

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Incidence, facteurs associés et impact du cancer au cours de la sclérodermie systémique

Titre original de l’article : Incidence, risk factors and outcomes of cancer in systemic sclerosis

Nom des auteurs : Morrisroe K, Hansen D, Huq M, Stevens W, Sahhar J, Ngian G, et al.

Disponible sur: https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/acr.24076 (PubMed)

Résumé fait par Docteur Alain LESCOAT (CHU Rennes) pour la filière FAI2R

Introduction : Le cancer au cours de la sclérodermie systémique (SSc) constitue la première cause de décès nondirectement lié à la maladie sclérodermique. Cette étude australienne vise à évaluer l’impact du cancer au sens large au cours de la SSc, en s’intéressant aux caractéristiques de la maladie associées à la survenue/présence d’un cancer, à son impact sur la mortalité, sur la qualité de vie et sur les dépenses de santé.

Matériel et méthodes : Les auteurs ont croisé les données de la cohorte nationale australienne de patients atteints de SSc avec le registre national australien de cancers. Les inclusions et le suivi concernaient la période 2008 à 2015. Les patients répondaient à la classification ACR/EULAR 2013 de la SSc, tous les types de cancers étaient considérés à l’exception des cancers cutanés non mélanomes. Le rapport standardisé de mortalité (RSM) correspondait au sur-risque de mortalité en comparaison à la population générale australienne ajustée sur l’âge et le sexe, le rapport standardisé d’incidence (RSI) de cancer correspondait au sur-risque de cancer en comparaison à la population générale australienne ajustée sur l’âge et le sexe sur la période 2008-2015.

Résultats : 1727 patients ont été inclus. L’incidence de cancers au sein de cette cohorte de patients sclérodermiques était de 1,3% par an, avec une prévalence de 14,2% et un RSI pour l’ensemble des cancers de 2,15 (93%CI 1,84-2,49). Les cancers les plus fréquents étaient les cancers du sein (30,2%), les mélanomes (18,5%), les hémopathies (13,5%) et les cancers du poumon (10,2%). De manière intéressante, seul le SIR des cancers du sein survenant dans les 5 premières années suivants le diagnostic de SSc était plus important que dans la population générale. Le résultat était le même pour les mélanomes. Ces résultats suggèrent l’existence de 2 pics de survenue de cancers au cours de la maladie : un pic précoce qui pourrait correspondre à un phénomène d’auto-immunité paranéoplasique et un pic plus tardif, qui pourrait ne pas avoir de lien direct avec la maladie sclérodermique. En analyse multivariée, la présence d’AC anti-ARN polymérase III était associée à un risque accru de cancer dans les 5 premières années de la maladie (OR=2,14 IC95% (1,03-4,45)). La présence d’une pneumopathie interstitielle diffuse était associée au cancer du poumon (OR=2,83 IC95%(1,09-7,31)). Les patients sclérodermiques avec un cancer avaient une mortalité accrue à la fois en comparaison avec la population générale australienne (RSM=3,13 (95%CI 2,39-4,02)) et en comparaison avec les patients sclérodermiques n’ayant pas de cancer (RSM=2,19 (95%CI 1,87-2,54)). Le fait d’avoir un cancer au cours de la SSc occasionnait un surcoût et un recours plus fréquent au système de santé. La qualité de vie était plus altérée chez les patients sclérodermiques ayant un cancer en comparaison à ceux n’en ayant pas.

Conclusion : Cette nouvelle étude, incluant un effectif conséquent de patients sclérodermiques, retrouve un risque accru de cancer chez ces patients, en particulier dans les 5 premières années de la maladie et notamment chez les patients ayant des anticorps anti-ARN polymérase III

Prédicteurs de l’aggravation de la maladie selon la progression des atteintes d’organe dans la sclérodermie systémique : une analyse EUSTAR.

Nom des auteurs: Becker M, Graf N, Sauter R, Allanore Y, Curram J, Denton CP, et al.

Références: Predictors of disease worsening defined by progression of organ damage in diffuse systemic sclerosis: a European Scleroderma Trials and Research (EUSTAR) analysis. Ann Rheum Dis. 21 juin 2019;annrheumdis-2019-215145. (PubMed)

Lien associé pubmed : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31227488

Résumé par le Docteur Nihal MARTIS (CHU Nice)

Introduction :

L’atteinte d’organe influe sur la mortalité dans la sclérodermie systémique (ScS). L’atteinte pulmonaire (la pneumopathie interstitielle diffuse ou l’hypertension pulmonaire [HTP]) est au premier rang des facteurs de risque de mortalité. Cependant, la survenue de ces évènements étant rare dans le cadre de populations sélectionnées pour des études cliniques, il était nécessaire de définir des critères d’aggravation fonctionnelle ou prédictifs de mortalité dans la ScS. L’objectif de cette étude était d’identifier des éléments permettant d’enrichir le recrutement de patients dans des études cliniques en fonction de critères jugeant l’aggravation de l’atteinte fonctionnelle et/ou la mortalité, à partir de la cohorte EUSTAR.

Matériel et méthodes :

Les critères d’inclusion étaient le diagnostic de ScS diffuse et un suivi de plus de 12±3 mois. L’aggravation de la maladie ou progression de l’atteinte d’organe étaient retenues si l’un parmi les critères suivants était présent : nouvelle crise rénale, aggravation de la fonction respiratoire ou cardiaque, HTP nouvellement suspectée à l’échocardiographie ou mortalité. Au total, 42 paramètres cliniques étaient sélectionnés pour l’analyse, par le biais (1) d’imputation reposant elle-même sur une imputation multivariée et (2) de la méthode LASSO.

Résultats :

Sur les 1451 patients répondant aux critères d’inclusion, 706 avaient des données complètes amenant à leur inclusion dans l’étude. Sur les 42 prédicteurs, seulement 8 ont été retenus dans le modèle de régression ultime. Il y avait des arguments forts pour une association forte entre la progression de la maladie et l’âge, les ulcères digitaux actifs, la fibrose pulmonaire, la faiblesse musculaire et l’élévation de la CRP. Ces 4 derniers paramètres étaient aussi associés à un temps jusqu’à la progression de la maladie plus court. Une validation selon la technique bootstrap avec 10 000 répétitions a permis de valider le modèle.

Conclusion :

L’utilisation des facteurs prédictifs présentés dans cette étude pourra permettre d’enrichir des cohortes de patients à risque d’aggravation globale dans les études sur la ScS.



Relationship between interstitial lung disease and oesophageal dilatation on chest high-resolution computed tomography in patients with systemic sclerosis : a cross-sectional study

Nom des auteurs: Salaffi F, Di Carlo M, Carotti M, Fraticelli P ; Gabrielli A, Giovagnoni A.

Références: Salaffi et al. Radiol Med. 2018;123(9):655-663.

doi: 10.1007/s11547-018-0894-3. PMID: 29687210

KEYWORDS: Gastro-oesophageal reflux disease; Interstitial lung disease; Oesophageal dilatation; Systemic sclerosis

Objectif :

La dilatation de l’oesophage (OD) a souvent été impliquée dans la pathogénie de lamaladie pulmonaire interstitielle ( ILD) de la sclérodermie systémique (SSc). Le but de cette étude était d’explorer l’association de l’OD et de la SSc par la tomodensitométrie ((TDM) à haute résolution thoracique (HRCT) et d’établir un seuil de référence (cut-off) pour lequel l’OD suggère la présence d’une atteinte pulmonaire significative.

Méthode :

Le plus large diamètre de l’oesophage (WOD) a été obtenu sur des images HRCT en coupe axiale. Les anomalies parenchymateuses sur HRCT ont été codées et classées selon la méthode de Warrick. Des épreuves fonctionnelles respiratoires avec mesure de la DLCO ont également été effectuées. L’analyse de régression multivariée a été utilisée pour identifier les facteurs associés à une dilatation de l’œsophage.

Résultats :

126 sujets ayant une SSc ont été inclus. La moyenne du WOD était de 13,5 (±4,2 mm), et 76 patients (60,3%) avaient un WOD supérieur ou égal à 11 mm. Les patients sclérodermiques avec ILD avaient  un diamètre oesophagien plus grand que ceux sans maladie pulmonaire (19,4 contre 14,1 mm, p< 0,001). Il a été observé une importante corrélation significative entre WOD et RGO (questionnaire GerdQ) (r=0,886, p<0,001), le score de Borg (r=0,705, p<0,001) et le Warrick score (r=0,614, p<0,01).  Le WOD était inversement correlé à la DLCO (r=-0,508, p<0,01). L’analyse multivariée démontrait une association positive entre WOD et RGO (p<0,0001), score de Borg (p<0,0005) et total Warrick score (p=0,019).

Conclusion :

Chez les patients sclérodermiques, une augmentation du diamètre de l’oesophage (>11 mm) sur les coupes HRCT est associée à des symptômes pulmonaires et oesophagiens, ainsi qu’à une maladie pulmonaire interstitielle plus sévère et une DLCO plus basse.

Challenges and support service preferences of informal caregivers of people with systemic sclerosis: a cross-sectional survey

Nom auteurs: Rice DB, Canedo-Ayala M, Carboni-Jimenez A., Carrier ME, Cumin J, Malcarne VL, Hagedoorn M, Thombs BD ; Scleroderma Caregiver Advisory Team.

Références: Rice et al. Disabil Rehabil. 2019 Jan 2:1-7.

doi: 10.1080/09638288

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