Combinaison Rituximab et mycophenolate mofetil chez des patients atteints d’une pneumopathie interstitielle (EVER ILD) : essai clinique en double aveugle, randomisé, versus placebo

Rituximab and mycophenolate mofetil combination in patients with interstitial lung disease (EVER-ILD): a double-blind, randomised, placebo-controlled trial

Résumé et analyse par Jérémy ANTONIADIS et supervisé par le Pr Brigitte GRANEL

Contexte :

Le traitement de première ligne des pneumopathies interstitielles diffuses (PID) avec un pattern de type pneumopathie interstitielle non spécifique (NSIP) est le Mycophénolate Mofétil (MMF). En cas d’inefficacité ou de rechute le Rituximab est utilisé.

L’essai EVER ILD est un essai de phase 3, randomisé en double aveugle, en groupe parallèle, multicentrique (conduit dans 17 centres académiques Français) évaluant l’efficacité et la sécurité du Rituximab(1000mg, 2 injections à J1 et J15) associé au MMF (2grammes pendant 6 mois) en comparaison au MMF seul, chez les patients atteints de PID associée à une connectivite ou une PID idiopathique (avec ou sans autoimmunité associée) ET un pattern scannographique de type NSIP ou d’une NSIP histologiquement confirmée.

Objectif :

Les auteurs ont voulu évaluer l’efficacité et la sécurité du Rituximab en association au MMF versus le MMF seul chez les patients atteints de PID et présentant un pattern scannographique de type NSIP défini par la présence de réticulation anormales prédominantes au base avec une extension peri-bronchovasculaire et une épargne sous pleural associée à des plages de verre dépoli. 

Matériel et méthode :

L’étude portait sur 122 patients âgés de plus de 18 ans atteints de PID associée à une connectivite (23

patients soit 53% avaient une Sclérodermie) ou de PID idiopathique (avec ou sans autoimmunité associée) ET d’un pattern scannographique de type NSIP ou histologiquement confirmée.

Les patients ne devaient pas présenter une autre maladie pulmonaire, ou une autre maladie jugée instable par l’investigateur. Les patients présentant une hypertension artérielle pulmonaire prouvée par un cathétérisme droit et ceux présentant un pattern typique ou probable de pneumopathie interstitielle usuelle ou une histologie avec un pattern différent de NSIP étaient exclus.

Les patients éligibles étaient réfractaires à une première ligne de corticothérapie ou d’un traitement immunosuppresseur ou avaient présenté une rechute de la maladie après traitement.

Le critère de jugement principal était l’évolution du % de la Capacité vitale forcée(CVF) à 6 mois en comparaison à l’état basal. Les critères de jugement secondaires étaient nombreux et incluaient la survie sans progression mesurée après 6 mois. `

Résultats :

122 patients ont été analysés : 63 dans le groupe Rituximab+MMF et 59 dans le groupe placébo+MMF. Les patients étaient majoritairement des femmes d’âge moyen de 66 ans. A l’état de base, la moyenne de la CVF en % était à 66,7 dans le groupe Rituximab+MMF et 70,2 dans le groupe placébo+MMF. A 6 mois, la CVF% montrait une progression de +1,60 dans le groupe Rituximab+MMF en comparaison à -2,01 dans le groupe placébo+MMF, soit une différence entre groupes de 3,60% [95% CI 0,41 to 6,80]; p=0,0273 (Figure). En volume, la CVF montrait une amélioration dans le groupe Rituximab+MMF de +41mL et une diminution dans le groupe placébo+MMF de -59mL, soit une différence significative entre les deux groupes de 100mL [95% CI 15 à 185], p=0,0207).

La survie sans progression était meilleure dans le groupe Rituximab+MMF que dans le groupe placébo+MMF, hazard ratio [HR] 0,47 [95% CI 0,23 à 0,96]; p=0,03 (Figure).

Une réduction de l’exposition aux corticoïdes à 6 mois était enregistrée dans le groupe Rituximab+MMF avec 1862mg contre 2314mg dans le groupe placébo+MMF.
Les effets indésirables graves en lien avec le traitement étaient plus fréquents dans le groupe Rituximab+MMF.

Conclusion : Cet article montre que la combinaison Rituximab et MMF augmente la CVF à 6 mois en comparaison au MMF seul avec une différence de 3,6% et de 100 mL sur la CVF à 6 mois chez les patients traités par la combinaison versus MMF seul. Le Rituximab en association au MMF semble être une stratégie raisonnable pour les patients présentant une NSIP. Des études à plus long terme sont nécessaires.


Rituximab versus cyclophosphamide intraveineux chez des patients avec une atteinte interstitielle pulmonaire diffuse associée à une connectivite au Royaume Uni(RECITAL) »

Rituximab versus intravenous cyclophosphamide in patients with connectivite tissue disease-associated interstitial lung disease in the UK (RECITAL) » Lancet Respir Med. 2023 Jan;11(1):45-54.

 doi: 10.1016/S2213-2600(22)00359-9. Epub 2022 Nov 11.

Résumé et analyse par Jérémy ANTONIADIS et supervisé par le Pr Brigitte GRANEL

Contexte :

Les pneumopathies interstitielles diffuses (PID) sont les complications fréquentes et souvent fatales de certaines connectivites et myosites inflammatoires. Le rituximab est souvent utilisé en traitement de rattrapage dans les pneumopathies interstitielles associées aux connectivites mais aucun essai clinique spécifique n’a jusqu’alors été réalisé.

L’essai clinique RECITAL est le premier essai multicentrique (11 centres spécialisées au Royaume Uni) en double aveugle contrôlé randomisé visant à évaluer l’efficacité et la sécurité du rituximab chez les patients atteints de connectivites et de pneumopathie interstitielle en comparaison au cyclophosphamide.

Objectif :

Les auteurs ont testé l’hypothèse selon laquelle le rituximab (1000 mg, 2 injections séparées de 2 semaines) serait supérieur au cyclophosphamide (600 mg/m² toutes les 4 semaines en IV pour 6 cures) dans le traitement des PID des maladies auto-immunes.

Matériel et méthodes :

L’étude portait sur 98 patients âgés de 18 à 80 ans atteints de PID sévère ou progressive présente sur un scanner thoracique datant de moins d’un an, liée soit à une sclérodermie, soit à une myosite inflammatoire idiopathique ou une connectivite mixte. Les patients ne devaient pas avoir déjà été traités par du rituximab ou du cyclophosphamide, avoir reçu des immunosuppresseurs autres qu’une corticothérapie orale dans les deux semaines avant la première injection de traitement. Ils ne devaient présentés aucun antécédent de maladies pulmonaire tel qu’un asthme, une BPCO ou un emphysème et leur capacité vitale forcée (CVF) devait être supérieure à 70%. Le critère de jugement principal était l’évolution de la CVF à 24 semaines après traitement.

Résultats :

97 patients ont été analysés : 48 dans le groupe cyclophosphamide et 49 dans le groupe rituximab. Les patients étaient majoritairement des femmes 73%, d’un âge moyen de 56 ans. A 24 semaines, la CVF montrait une amélioration dans les deux groupes, de 99 mL dans le groupe cyclophosphamide et de 97 mL dans le groupe rituximab, soit une différence non significative du critère principal à la 24ème semaine de –40 mL (95% CI –153 to 74; p=0·49, Figure 2). Aucune différence significative n’était relevée pour les paramètres secondaires entre les deux groupes de traitements, à l’exception du GDA (physician-assessed global disease activity) score à la semaine 48 qui montrait une différence significative pour les patients du groupe cyclophosphamide.

Une réduction de l’exposition aux corticoïdes à la semaine 48 était enregistrée dans le groupe rituximab (37,6mg d’hydrocortisone contre 42,9mg) soit une réduction de 12,3%. La survie globale et la survie sans progression ne différaient pas entre les deux groupes. Les effets indésirables étaient moins nombreux chez les patients recevant du rituximab que ceux recevant du cyclophosphamide.

Conclusion :

Cet article montre que le Rituximab n’est pas supérieur au cyclophosphamide dans le traitement des PID associées aux connectivites. Une amélioration de la CVF est observée avec le Rituximab, de façon similaire à celle du groupe traité par cyclophosphamide. On note également une diminution des effets indésirables et une réduction de l’exposition aux corticoïdes sous Rituximab.

L’étude Récital suggère donc que le Rituximab pourrait être une alternative au cyclophosphamide, un futur essai de non-infériorité serait approprié afin de pouvoir définir un nouveau gold standard.

Cet essai ouvre la voie à d’autres possibilités d’association thérapeutique notamment par la combinaison du Rituximab avec le MMF, comme cela vient d’être rapporté dans l’étude EVER ILD en 2023 (Eur Respir J. 2023 Jun 8;61(6):2202071. doi: 10.1183/13993003.02071-2022. Print 2023 Jun.)

Données à long terme après un traitement par Rituximab chez les patients atteints de Sclérodermie Systémique

D’après “Long-term outcomes after Rituximab treatment for patients with Systemic Sclerosis” Ai Kuzumi et al, JAMA Dermatology 2023 DOI: 10.1001/jamadermatol.2022.6340

Résumé et analyse par Magali LE BRUN et Supervisé par le Pr Brigitte GRANEL

Contexte
La sclérodermie systémique (ScS) est une maladie auto-immune caractérisée par une vasculopathie et une fibrose excessive cutanée et pulmonaire. Le pronostic de cette maladie est globalement mauvais avec une mortalité de 30% à 10 ans. Peu de traitements ont montré leur efficacité. Bien que la physiopathologie de la ScS soit incomplètement comprise, de nombreux travaux suggèrent que les lymphocytes B (LB) jouent un rôle majeur via la synthèse d’auto-anticorps, la production de cytokines et l’activation d’autres cellules immunitaires.

Le rituximab (RTX) est un anticorps monoclonal chimérique qui déplète les LB circulants en ciblant le CD20, leur antigène spécifique. Utilisé dans d’autres maladies auto-immunes, le RTX entraîne une diminution des immunoglobulines (Ig) sériques.

L’essai clinique DESIRES comportait 2 phases de 24 semaines chacune, la première en double aveugle contrôlée RTX contre placebo et la seconde en ouvert [1]. Cet essai a montré une diminution de la fibrose cutanée chez les patients atteints de ScS traités par RTX. Toutefois, les effets à long terme du traitement et les marqueurs prédictifs de réponse sont inconnus.

Objectif
Les auteurs ont recueilli les données de réponse à long terme et les marqueurs prédictifs de la réponse au traitement chez 29 patients ayant continué à recevoir du RTX après la fin du protocole DESIRES.

Matériel et méthodes
L’étude portait sur 29 des 43 patients ayant terminé l’essai DESIRES (12 ayant refusé de poursuive le RTX, et 2 ayant été perdus de vue durant le suivi). Les patients inclus répondaient aux critères de l’ACR-EULAR 2013 et présentaient un score cutané de Rodnan (mRSS) supérieur à 10, ainsi qu’une atteinte pulmonaire non sévère (capacité vitale forcée CVF > 60%, pas d’hypertension pulmonaire). Ils ne devaient pas avoir reçu de corticothérapie forte dose, d’anti-fibrosant, ou d’immunosuppresseur dans les semaines précédentes.
Les patients étaient suivis pendant 24 semaines après chaque cure de RTX, avec une évaluation régulière des atteintes cutanée et pulmonaire, des résultats de biologie standard ainsi que des taux sériques de KL-6, un marqueur validé dans le suivi de la pneumopathie interstitielle diffuse (PID) de la ScS.

Résultats
Les patients étaient majoritairement des femmes (93%), d’un âge médian de 48 ans, dont 86% avaient une forme cutanée diffuse et 83% présentaient une fibrose pulmonaire sur la TDM. Les patients ont reçu une médiane de 4 cures de rituximab et étaient suivis sur une médiane de 96 (96-120) semaines. Il existait une diminution du mRSS dès la première cure de RTX et une amélioration significative de la CVF prédite dès la 3ème cure, avec dans les 2 cas un maintien de l’efficacité dans le temps (Figure).
Les forts répondeurs (diminution du mRSS de plus de 9 points) avaient reçu plus de cures de RTX que les faibles répondeurs (diminution du mRSS de moins de 8 points), et présentaient un mRSS initial plus élevé ainsi qu’une diminution des taux d’Ig sériques plus marquée. Le taux d’IgA notamment était corrélé à la baisse du mRSS. Un faible taux d’IgM au début de l’étude et lors du dernier suivi était quant à lui associé à une amélioration plus importante de la CVF. On notait enfin une diminution des taux de KL-6 allant dans le sens d’une amélioration de la PID. Les effets indésirables étaient essentiellement infectieux, sans décès rapporté.

Conclusion

Cet article montre que le RTX en cures répétées permet une amélioration de la fibrose cutanée et de la fonction respiratoire chez les patients atteints de ScS, avec un maintien de l’efficacité dans le temps.
Cet effet semble être associé à une diminution des taux d’immunoglobulines sériques, ce qui pourrait permettre de développer un outil prédictif de l’efficacité du RTX chez ces patients.
Cette étude ouvre la voie à des essais cliniques contrôlés de plus fort effectif pour confirmer l’efficacité sur la fibrose cutanée et l’atteinte pulmonaire, valider les facteurs prédictifs de réponse et recueillir les risques infectieux en lien avec les cures répétées du RTX.

[1] Ebata S, Yoshizaki A, Oba K, et al. Safety and efficacy of rituximab in systemic sclerosis (DESIRES): a double-blind, randomised, placebo-controlled trial. Lancet Rheumatol. 2021

Figure : Evolution du score cutané de Rodnan et de la capacité vitale forcée sous rituximab

Taux d’incidence standardisé et facteurs de risque de cancer chez les patients atteints de sclérodermie systémique: données du registre espagnol de sclérodermie (RESCLE)

Résumé par Magali LE BRUN
Supervisé par le Pr Brigitte GRANEL

d’après” Standardized incidence ratios and risk factors for cancer in patients with systemic sclerosis: Data from the Spanish Scleroderma Registry (Registro Español de SCLErodermia, RESCLE)”

Contexte
La sclérodermie systémique (ScS) est une maladie auto-immune conduisant à des lésions vasculaires et une fibrose excessive cutanée et pulmonaire. Les principales causes de mortalité sont l’hypertension pulmonaire (HTP) et la pneumopathie interstitielle diffuse (PID). Toutefois, les progrès réalisés ces dernières décennies dans le dépistage et la prise en charge de ces manifestations ont permis la diminution de la mortalité associée à la ScS, avec comme corollaire une augmentation de la mortalité non liée à la ScS. Il semble exister une augmentation de la prévalence des néoplasies chez ces patients. Plusieurs facteurs de risque de néoplasie ont été identifiés dans la ScS, notamment la présence d’anticorps anti-ARN polymérase III, mais des études épidémiologiques plus précises sont nécessaires afin de pouvoir envisager le développement de programmes de prévention.

Objectif
Les auteurs ont analysé le taux d’incidence standardisé (TIS) de cancer chez les patients avec ScS dans la population espagnole, puis ont cherché à identifier les facteurs de risque de cancer chez ces patients.

Matériel et méthodes

L’étude portait sur les patients du registre observationnel multicentrique (40 hôpitaux) national de la ScS en Espagne (RESCLE). Les patients inclus répondaient aux critères de l’ACR-EULAR 2013 et/ ou aux critères modifiés de LeRoy et Medsger (1988), incluant les patients ne présentant pas d’atteinte cutanée de la ScS. Les données étaient collectées de façon rétrospective jusqu’en 2006, puis de façon prospective jusqu’en 2018. L’étude évaluait l’incidence des cancers et les facteurs de risque imputables dans leur survenue.

Résultats
Parmi les 1930 patients de la cohorte, 206 (soit 10,7%) présentaient un cancer au cours du suivi et 34 (18,9%) des tumeurs ont été considérées comme associées à la ScS. Le risque de cancer était plus élevé chez les patients avec ScS que dans la population générale (TIS 1,48; IC95 [1,36-1,6O]), avec notamment un sur-risque de cancer du sein, du poumon, et hématologique. Les facteurs de risque associés au cancer chez les patients avec ScS étaient l’âge de début plus élevé au diagnostic, la présence d’une PID avec capacité vitale forcée < 70%, et la présence d’une cholangite biliaire primitive (CBP). La présence d’anticorps anti-centromères (ACA) semblait protectrice contre le risque de cancer. Du fait du faible nombre de positivité, l’association avec la présence d’anti-ARN polymérase III n’était pas retrouvée. Les taux de mortalité étaient plus importants chez les patients ScS avec cancer que chez ceux sans cancer, principalement en lien avec des manifestations non liées à la ScS et en premier lieu le cancer (suivi par le sepsis). A l’opposé, les principales causes de mortalité chez les patients ScS sans cancer étaient la PID et l’HTP liées à la ScS.

Conclusion
Le risque de cancer est plus élevé chez les patients avec ScS que dans la population générale, avec notamment une fréquence des cancers du sein, du poumon et hématologiques. Les facteurs de risque identifiés comportent une atteinte interstitielle pulmonaire modérée à sévère et la présence d’une CBP, tandis que les ACA auraient un rôle protecteur. Cette étude montre l’importance de suivre de façon étroite les patients avec ScS notamment ceux avec une PID ou une CBP, étant donné le risque de cancer plus élevé dans cette population.

Efficacité et sécurité du nintedanib chez les patients atteints de pneumopathie interstitielle diffuse associée à la sclérodermie systémique : analyse de sous-groupe en fonction du statut anticorps et du score de Rodnan modifié

Veille Bibliographique pour le site GFRS – Résumé par Magali LE BRUN (sous la direction de Brigitte GRANEL)

D’après “Efficacy and safety of nintedanib in patients with systemic sclerosis associated interstitial lung
disease: Subgroup Analyses by Autoantibody Status and Modified Rodnan Skin Thickness Score”- Masataka Kuwana et al, Arthritis & Rheumatology2022 doi:10.1002/art.41965

Objectif
Les auteurs ont cherché à évaluer l’efficacité et la sécurité du nintedanib en fonction du statut des ATA,
de la forme cutanée et du score de Rodnan modifié, des facteurs connus pour être associés à la
progression de la maladie, chez les patients de l’étude SENSCIS.

Contexte
Jusqu’en 2019, la prise en charge standardisée de la pneumopathie interstitielle diffuse de la
sclérodermie systémique (PID-ScS) reposait en première ligne sur le mycophénolate mofétil (MMF),
avec possibilité d’introduire un autre immunosuppresseur en cas d’échec. Malgré cela, la PID-ScS
grève le pronostic de la maladie et demeure une des principales causes de mortalité, en partie parce
qu’aucun traitement n’a montré d’efficacité sur la fibrose pulmonaire. Les facteurs de risque de
progression suspectés de cette atteinte sont notamment la présence d’anticorps anti-topoisomérase 1
(ATA), l’atteinte cutanée diffuse (dcScS) et un score de Rodnan modifié > 18.
Le nintedanib est une molécule de faible poids moléculaire inhibiteur des tyrosine-kinases des
récepteurs des facteurs de croissance dérivés des plaquettes (PDGFR), des fibroblastes (FGFR) et de
l’endothélium vasculaire (VEGFR). Il bloque la cascade de signalisation intracellulaire de ces facteurs
de croissance, et par là-même la prolifération, la migration et la différenciation des fibroblastes et des
myofibroblastes pulmonaires.
Les études INPULSIS (2014), INBUILD (2019) et SENSCIS (2019) ont montré l’efficacité du
nintedanib sur le déclin de la capacité vitale forcée (CVF) respectivement dans la fibrose pulmonaire
idiopathique, les PID fibrosantes chroniques de phénotype progressif et la PID-ScS.

Nintedanib

Matériel et méthodes
L’étude SENSCIS était une étude randomisée contrôlée contre placebo en double aveugle. Les critères
d’inclusion étaient un diagnostic de ScS de moins de 7 ans et de PID de moins de 12 mois, une fibrose
pulmonaire > 10% avec une CVF qui restait > 40% et un DLCO entre 30 et 89%, et une prise de
prednisone < 10mg/ jour. Les sous groupes d’intérêt de cette étude comprenaient les 350 patients qui
avaient des ATA, les 299 patients avec une dcScS et les 130 patients qui avaient un score de Rodnan
modifié > 18, comparés respectivement aux patients sans ATA, à ceux avec atteinte cutanée limitée
(lcScl) et à ceux avec un Rodnan < 18.
Cette analyse de sous-groupes de l’étude SENSCIS évaluait le déclin annuel de la CVF à 52 semaines
(critère de jugement principal) et la proportion de patients présentant un déclin annuel de la CVF
supérieur à 3,3% (critère post-hoc, % de différence considérée significative de l’aggravation
respiratoire) sous nintedanib par rapport au placebo.

Lire la suite…

La cartographie paramétrique par résonance magnétique cardiaque peut détecter une atteinte cardiaque précoce chez les patients atteints de sclérodermie systémique

Résumé par Magali LE BRUN (interne DES de médecine interne-immunologie clinique)  &  Brigitte GRANEL

 Cardiac magnetic resonance parametric mapping can detect early cardiac involvement of patients with systemic sclerosis: M. Purevsuren, M. Uehara, M. Ishizuka, T. Hara, N. Kakuda, T. Tsuji, T. et alEuropean Heart Journal, Volume 42, Issue Supplement_1, October 2021, ehab724.0223, https://doi.org/10.1093/eurheartj/ehab724.0223

Introduction : La sclérodermie systémique (ScS) est une pathologie auto-immune avec deux formes cutanées : limitée et diffuse. Cette dernière est généralement associée à des atteintes fibrosantes d’organes plus sévères que la forme limitée et son pronostic est moins bon. La place de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque avec cartographie paramétrique dans la détection de l’atteinte myocardique précoce chez les patients atteints de ScS n’est pas encore codifiée.

Objectif : Déceler l’atteinte myocardique en IRM cardiaque et évaluer les différences entre les deux formes cutanées.

Méthodes : L’étude a inclus de manière consécutive 57 patients atteints de SSc : 27 formes cutanées diffuses (dScS) et 30 limitée (lScS) qui avaient consulté à l’Hôpital universitaire de médecine de Tokyo entre Juillet 2018 et Février 2021, et qui avaient passé une IRM cardiaque 3T. L’atteinte myocardique a été analysée grâce à l’IRM cardiaque  avec cartographie paramétrique, et comparée aux données cliniques.

Résultats : La  durée moyenne d’évolution de la maladie étaient proches, 4,0±6,5 et 4,4±8,3 ans respectivement chez les patients dScS et lScS. Chez l’ensemble de ces patients l’évaluation de la fraction d’éjection du ventricule gauche (FEVG) était similaire: 58,8 % chez les patients avec dScS vs 59,6 % chez ceux avec lScS. En revanche les volumes atriaux gauche et droit étaient significativement supérieurs chez les patients avec dScS comparés à ceux avec lScS.

Les valeurs en pondération T1 au sein du septum inter-ventriculaire (SIV) avant et après injection de Gadolinium étaient supérieures chez les patients avec dScS vs lScS : il n’y avait en revanche pas de différence en cartographie du volume extra-cellulaire ni en T2. Ainsi, les valeurs en T1 pré-Gadolinium dans le SIV étaient corrélées positivement avec le ratio E/e’  en échocardiographie-Doppler (*) et avec les taux plasmatiques de BNP, chez les patients avec dScS et l’ensemble des patients avec ScS, mais pas chez ceux avec lScS.

L’analyse de régression logistique multivariée permettait de conclure que la valeur en T1 natif dans le SIV est un facteur prédictif indépendant du rapport E/e’ dans les populations ScS et dScS.

Lors de la construction de la courbe ROC, pour un rapport E/e’ ≥ 14, la valeur seuil en T1 natif est ≥ 1348 ms (AUC 0,762 sensibilité de 80 % et spécificité de 68%). Par ailleurs, les taux de BNP étaient significativement plus hauts chez ces patients en comparaison de ceux avec un T1 natif < 1348 ms.

Conclusion : Les patients avec une dScS avaient des valeurs de T1 non injecté au niveau du SIV plus élevées, et des volumes atriaux gauche et droit plus importants que les patients avec une lScS. Cela suggère que ces patients avaient une atteinte myocardique et une dysfonction diastolique du VG plus sévères, hypothèse qui est soutenue par un rapport E/e’ et des taux de BNP plus élevés chez eux, par rapport aux patients avec lScS. La détection précoce de valeurs élevées en T1 spontané sur le SIV chez les patients atteints de ScS pourrait ainsi prédire la survenue d’événements cardio-vasculaires futurs.

(* ) Le rapport E/e’ est un équivalent du rapport E/A permettant l’évaluation de la fonction diastolique ventriculaire gauche. L’onde E correspond au remplissage précoce passif du VG dépendant du gradient de pression (70% du remplissage total), l’onde A représente le remplissage tardif par la systole atriale. L’onde e’ correspond à la vitesse de déplacement de l’anneau mitral vers le VG en proto-diastole, et dépend uniquement de la capacité de relaxation du VG. Un rapport E/e’ augmenté suppose donc une capacité de relaxation du VG altérée avec dysfonction diastolique.

Magali LE BRUN  & Brigitte GRANEL

Multiple variants of soluble CD146 are involved in Systemic Sclerosis: identification of a novel pro-fibrotic factor. Marie NOLLET, Richard BACHELIER, Ahmad JOSHKON, et al.

Marie NOLLET, Richard BACHELIER, Ahmad JOSHKON, et al.

Arthritis Rheumatol. 2022 Jan 9.doi: 10.1002/art.42063. Online ahead of print.

Résumé par Brigitte GRANEL

Contexte

La sclérodermie systémique (ScS) est une maladie auto-immune caractérisée par une fibrose excessive, un dysfonctionnement immunitaire et des lésions vasculaires. CD146 est une glycoproteine transmembranaire essentiellement exprimée sur le système vasculaire. Elle est impliquée dans la perméabilité vasculaire, l’inflammation et l’angiogénèse. Deux isoformes membranaires de CD146 ont été décrits, un long et un court.

Les auteurs ont préalablement montré que le CD146 soluble (sCD146) pourrait constituer un nouveau biomarqueur de la sévérité de la maladie et que les injections de sCD146 réduisaient la gravité de la pathologie dans un modèle animal de ScS.


Lire la suite…

La cartographie paramétrique par résonance magnétique cardiaque peut détecter une atteinte cardiaque précoce chez les patients atteints de sclérodermie systémique

Cardiac magnetic resonance parametric mapping can detect early cardiac involvement of patients with systemic sclerosis

M. Purevsuren, M. Uehara, M. Ishizuka, T. Hara, N. Kakuda, T. Tsuji, T. et al

European Heart Journal, Volume 42, Issue Supplement_1, October 2021, ehab724.0223, https://doi.org/10.1093/eurheartj/ehab724.0223

Résumé par Magali LE BRUN (interne DES de médecine interne-immunologie clinique) & Brigitte GRANEL

Introduction : La sclérodermie systémique (ScS) est une pathologie auto-immune avec deux formes cutanées : limitée et diffuse. Cette dernière est généralement associée à des atteintes fibrosantes d’organes plus sévères que la forme limitée et son pronostic est moins bon. La place de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque avec cartographie paramétrique dans la détection de l’atteinte myocardique précoce chez les patients atteints de ScS n’est pas encore codifiée.

Objectif : Déceler l’atteinte myocardique en IRM cardiaque et évaluer les différences entre les deux formes cutanées.


Lire la suite…

Efficacité et sécurité du nintedanib chez les patients atteints de pneumopathie interstitielle diffuse associée à la sclérodermie systémique et traités par Mycophénolate – une analyse de sous-groupe de l’essai SENSCIS”

K. B Highland et al, Lancet Respir Med 2021 PMID:33412120 doi: 10.1016/S2213-2600(20)30330-1

Résumé par Magali LE BRUN, sous la direction de Brigitte GRANEL, pour le site du GFRS

Contexte
Jusqu’en 2019, la prise en charge standardisée de la pneumopathie interstitielle diffuse de la sclérodermie systémique (PID-ScS) reposait en première ligne sur le mycophénolate mofétil (MMF), avec possibilité d’introduire un autre immunosuppresseur en cas d’échec. Malgré cela, la PID-ScS grève le pronostic de la maladie et demeure une des principales causes de mortalité, en partie parce qu’aucun traitement n’a montré d’efficacité sur la fibrose pulmonaire.
Le nintedanib est une molécule de faible poids moléculaire inhibiteur des tyrosine kinases des récepteurs des facteurs de croissance dérivés des plaquettes (PDGFR), des fibroblastes (FGFR) et de l’endothélium vasculaire (VEGFR). Il bloque la cascade de signalisation intracellulaire de ces facteurs de croissance, et par là-même la prolifération, la migration et la différenciation des fibroblastes et des myofibroblastes pulmonaires.
Les études INPULSIS (2014), INBUILD (2019) et SENSCIS (2019) ont montré l’efficacité du nintedanib sur le déclin de la capacité vitale forcée (CVF) respectivement dans la fibrose pulmonaire idiopathique, les PID fibrosantes chroniques de phénotype progressif et la PID-ScS.

Objectif
Les auteurs ont cherché à évaluer l’efficacité et la sécurité du nintedanib en fonction de la prise du MMF dans la PID-ScS chez les patients de l’étude SENSCIS.

Matériel et méthodes
L’étude SENSCIS était une étude randomisée contrôlée contre placebo en double aveugle. Les critères d’inclusion était un diagnostic de ScS posé depuis moins de 7 ans et de PID depuis moins de 12 mois, une fibrose pulmonaire > 10% avec une CVF> 40%, et un DLCO entre 30 et 89%, une prise de prednisone < 10mg/ jour. Le sous groupe d’intérêt de cette étude comprenait les 279 patients qui prenaient du MMF depuis plus de 6 mois. Ce sous groupe était comparé aux 297 patients de cette étude non traités par MMF.
L’étude SENSCIS évaluait le déclin annuel de la CVF à 52 semaines (critère de jugement principal), la proportion de patients présentant un déclin annuel de la CVF supérieur à 3,3% (critère post-hoc, % de différence considérée significative de l’aggravation respiratoire) et les effets indésirables du nintedanib par rapport au placebo.

Résultats
Une réduction du taux de déclin annuel de la CVF sous nintedanib a été observée dans les 2 sous-groupes : réduction du déclin annuel de la CVF de 26,3 ml en faveur du nintedanib dans le sous-groupe traité par MMF (déclin de – 40,2 ml/an sous nintedanib versus -66,5 ml/an sous le placebo de nintedanib), et de 55,4 ml dans le sous-groupe non traité par MMF (déclin de – 63,9 ml/an sous nintedanib versus -119,3 ml/an sous le placebo de nintedanib). Il n’y avait pas de différence significative d’efficacité du nintedanib en fonction de la prise du MMF (p=0,45). Les auteurs ont montré que la proportion de patients présentant à 52 semaines une aggravation de la CVF supérieure à 3,3% était moindre chez les patients traités par nintedanib que par le placebo de nintedanib, et ce indépendamment de la prise de MMF.
Concernant les effets indésirables tout confondu, ils n’ont pas été plus fréquents chez les patients prenant du nintedanib par rapport au placebo, sans différence significative en fonction de la prise de MMF. L’effet indésirable principalement rapporté par les patients a été la diarrhée (76% des patients sous nintedanib vs 34% sous placebo sans différence significative avec ou sans MMF). Il faut noter toutefois que les patients traités par MMF l’étaient depuis plus de 6 mois, ce qui impliquait une bonne tolérance du traitement.

Conclusion
L’efficacité du nintedanib sur le ralentissement du déclin de la CVF et sa tolérance chez les patients atteints de PID-ScS, sont similaires que les patients soient traités par MMF ou non.
De nouvelles études randomisées sont donc nécessaires afin d’évaluer le traitement par nintedanib et MMF de manière combinée ou séquentielle.
En pratique, chez les patients atteints de PID-ScS, il est possible d’introduire le MMF en première ligne à visée anti-inflammatoire à la phase initiale, puis de rajouter le nintedanib en cas d’évolution fibrosante si le MMF est bien toléré.

Tocilizumab in systemic sclerosis: a randomised, double-blind, placebo-controlled, phase 3 trial

« Tocilizumab dans la sclérodermie systémique: un essai de phase 3 randomisé, en double aveugle, versus placebo »

Journal: Lancet Respiratory Medicine

Auteurs : Dinesh Khanna, Celia J F Lin, Daniel E Furst, Jonathan Goldin, Grace Kim, Masataka Kuwana, Yannick Allanore, Marco Matucci-Cerinic, Oliver Distler, Yoshihito Shima, Jacob M van Laar, Helen Spotswood, Bridget Wagner, Jeffrey Siegel, Angelika Jahreis, Christopher P Denton, focuSSced investigators

Lancet Respir Med. 2020 Oct; 8(10):963-974.

doi: 10.1016/S2213-2600(20)30318-0. PMID: 32866440


Résumé par Fanny Mariette et Benjamin Chaigne

Contexte :

L’essai de phase 2 contrôlé randomisé faSScinate, a évalué l’efficacité et la tolérance du TOCILIZUMAB* dans la sclérodermie systémique. Le critère de jugement principal qui était la modification du score cutané modifié de Rodnan (mRSS) à 24 semaines n’a pas été atteint : -3,92 dans le groupe TOCILIZUMAB contre -1,22 groupe contrôle avec une différence de -2,70 [95%IC –5,85 – 0,45], p=0,09. Néanmoins, dans cet essai, moins de patients traités par TOLICIZUMAB ont eu une baisse de la capacité vitale forcée (CVF), probablement en lien avec la réduction de l’expression de gènes associés aux macrophages profibrotiques. L’article résumé ici présente l’essai de phase III foccussced qui fait suite à l’étude faSScinate.

* anticorps monoclonal humanisé inhibiteur du récepteur a de l’interleukine (IL)-6  qui se lie spécifiquement aux fractions soluble et membranaire du récepteur, bloquant la transmission du signal médié par ce récepteur.

Lire la suite…